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Au fil des siècles, les vins de Châteauneuf-du-Pape ont été élevés au rang des plus grands. Mais pourquoi cette appellation rhodanienne a-t-elle fait l’unanimité à tous les niveaux ?
Un cru historique
Bien que la vigne ait été implantée à Châteauneuf-du-Pape dès l’époque romaine, il faut attendre Jean XXII et la lignée papes d’Avignon pour que le cru se développe. En effet, la proximité entre la ville papale et ce vignoble en a fait une source d’approvisionnement privilégiée pour les souverains pontifes qui se faisaient livrer des tonneaux à chaque vendange. A l’époque, il n’est toutefois pas question de rouges comme on en a aujourd’hui l’habitude. Ceux sont les blancs qui dominent avec une dominance progressive du Muscat. Même après le départ des papes du palais d’Avignon, Châteauneuf-du-Pape garde une place privilégiée dans le vignoble français.
Il faut toutefois attendre la fin du XIXème siècle et les grandes maladies de la vigne pour que l’on se rapproche de l’image de Châteauneuf-du-Pape que l’on a aujourd’hui. Les épidémies successives ont, en effet, forcé les vignerons à arracher les vignes et à les remplacer par des croisements plus résistants. Ils en profitent alors pour adapter leurs vins aux goûts du moment. Place alors aux Grenaches, Syrahs et consorts qui se taillent la part du lion dans les assemblages.
Châteauneuf-du-Pape joue enfin un rôle clef dans l’histoire moderne du vignoble français puisque ce sont les vignerons du cru qui servent de moteur à la reconnaissance des AOC et à la fondation de l’INAO.
Une appellation, des terroirs d’exception
Châteauneuf-du-Pape ne doit toutefois pas sa renommée à un simple hasard de l’histoire. La large appellation de 3 200 hectares que se partagent quelque 320 vignerons bénéficient de terroirs exceptionnels. C’est d’abord l’influence du Rhône voisin sur le climat qu’il faut saluer. Le fleuve apporte avec lui le mistral en provenance du Nord. Celui-ci permet de faire baisser le mercure et donc d’éviter des épisodes caniculaires récurrents. Il ventile également le vignoble, aidant donc la lutte contre les maladies cryptogamiques (i.e. maladies liées aux champignons). Face au mistral, se dresse un ensoleillement méditerranéen et un climat sec qui garantissent d’avoir des raisins mûrs – au détriment parfois des rendements.
Le climat et les sols de Châteauneuf-du-Pape ont d’ailleurs une interaction assez unique. Les célèbres galets roulés qui recouvrent une bonne partie de l’appellation emmagasinent en effet la chaleur et la libèrent une fois le soleil couché. Résultat, la vigne ne souffre pas de chocs de températures et le gel n’est que très rarement problématique sur l’appellation. La composition des sols est, quant à elle, très diverse d’un point à l’autre du vignoble papal. Une fois passée la couche de galets roulés, on peut aussi bien tomber sur du sable que de l’argile ou même du calcaire (celui-ci restant quand même plus anecdotique).
La plupart des domaines jouent de cette diversité pour assembler des parcelles aux profils différents, tant en termes d’exposition au soleil que de géologie. C’est là l’une des grandes richesses de Châteauneuf-du-Pape.
Une grande diversité de vins
On l’aura compris, qui dit multiplicité de terroirs dit multiplicité de vins tant en termes de couleur, de cépages ou de profil. On retrouve en effet 13 cépages différents à Châteauneuf-du-Pape. Résultat, aucun domaine n’a le même assemblage que son voisin et tous les vins sont différents les uns des autres. Mieux, chaque cépage a son terroir de prédilection, l’endroit où il donnera les meilleurs raisins. En fonction de ses parcelles et des ses préférences ampélographique, le vigneron va donc, par exemple, préférer le Mourvèdre à la Syrah pour ses rouges et la Roussanne au Bourboulenc pour ses blancs. Par ailleurs, on retrouve très peu de vins en “monocépage” à Châteauneuf-du-Pape, la plus célèbre exception étant le 100% Grenache du légendaire château Rayas.
La plupart des vignerons s’épanouissent dans cette liberté et cela se poursuit alors une fois arrivé au chai. Fûts de chêne neufs, foudre, cuves inox, amphores voire même ovoïdes, ils se sont tous frayé leur chemin jusque dans les souterrains de l’appellation.
Verdict, on ne sort pas indifférent d’une journée à Châteauneuf-du-Pape. Mieux, chacun peut y trouver chaussure à son pied tant il y a une grande diversité dans l’offre de vins. Vous pourrez vous procurer des flacons anniversaires qui auront peut-être mieux vieilli que vous tout comme des bouteilles à tirer dans l’année pour un plaisir immédiat. Les amateurs de blancs ne seront pas non plus en manque puisque l’on assiste à une croissance, qualitative autant que quantitative, des blancs sur l’appellation.
© Photo : Château Gigognan