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Si les vins doux sont majoritairement blancs, il existe plusieurs exemples de rouge sucrés élaborés dans une large palette de styles, en France et ailleurs.
Les vins doux naturels rouges
Le procédé d’élaboration de vins rouges sucrés le plus répandu en France est le mutage, qui consiste à ajouter de l’alcool vinique au moût de raisin avant ou pendant la fermentation.
Dans cette catégorie se classent les vins doux naturels (VDN), spécialités des vignobles du Languedoc-Roussillon (Banyuls, Rivesaltes, Maury) et de la Vallée du Rhône méridionale (Rasteau), qui se déclinent aussi bien en blanc qu’en rosé et en rouge. Ils sont élaborés à partir de raisins – en grande majorité du cépage grenache noir pour les rouges – récoltés à pleine maturité, lorsqu’ils présentent un taux de sucre suffisamment élevé.
Au cours de la fermentation, un alcool neutre d’origine vinique est ajouté au moût de raisin, stoppant ainsi le processus en augmentant le degré alcoolique tout en conservant du sucre résiduel, plus ou moins important selon le moment auquel intervient le mutage.
L’élevage est traditionnellement réalisé en milieu oxydatif dans de grands contenants (en fût de chêne usagé, en foudre ou en bonbonne de verre) pas entièrement remplis. L’oxydation est à l’origine du changement de couleur vers des teintes tuilées, ainsi que du développement d’arômes d’évolution caractéristiques (fruits mûrs confits, miel, café, cacao). Les vins ayant fait l’objet d’un élevage d’au moins cinq ans sont qualifiés de « hors d’âge ». Selon les conditions d’élevage, ils peuvent développer un goût spécifique qualifié de « rancio » (torréfaction, noix, amande).
Un autre mode d’élevage consiste, à l’inverse, à éviter toute oxydation en conservant les vins à l’abri de l’air afin qu’ils préservent leur fraîcheur et leurs arômes primaires fruités. Ils portent généralement la mention « grenat » (Rivesaltes, Maury et Rasteau) ou « rimage » (Banyuls). Ce dernier, à titre d’exemple, développe des arômes de petits fruits noirs, de cerise et de kirsch.
Quel que soit leur style, les VDN rouges sont riches et puissants, avec une grande persistance aromatique. Leur sucrosité, alliée à la complexité de leurs arômes, en font d’excellents compagnons de desserts au chocolat ou au café, mais également de fromages à pâte persillée (roquefort, fourme d’Ambert). Ils peuvent également se marier avec des mets salés tels qu’un magret de canard aux cerises ou encore un foie gras mi-cuit accompagné d’un confit de figues.
Les autres vins mutés
Parmi les appellations produisant des vins rouges doux selon un procédé similaire aux VDN, le Porto est sans conteste le plus réputé, au-delà des frontières nationales. Originaire de la ville éponyme, sur la côte nord-ouest du Portugal, le Porto est issu de cépages locaux – le plus connu étant le touriga nacional – cultivés sur les coteaux escarpés de la vallée du Douro.
Différents modes et durées d’élevage, à l’instar des VDN, divisent ces vins en deux grandes familles : les Ruby, embouteillés rapidement et présentant des notes marquées de fruits mûrs, et les Tawny, caractérisés par leur style oxydatif. Les vins issus de catégories supérieures bénéficient d’un élevage prolongé (tels que les Tawny Reserve ou avec indication d’âge) et peuvent être millésimés (Late Bottled Vintage ou Vintage). Les meilleurs offrent ainsi une structure, une concentration et une longueur exceptionnelles qui leur confèrent un grand potentiel de garde.
Lorsque le mutage est réalisé avant ou au tout début de la fermentation alcoolique, on parle de vin de liqueur. C’est notamment le cas du Macvin du Jura, fortifié à l’eau-de-vie de marc de Jura, ou encore du Pineau des Charentes, muté au cognac. D’autres pays produisent également des vins de liqueur, l’exemple le plus connu étant le Marsala, produit en Italie sur la côte ouest de la Sicile. Tous ces vins ont pour point commun leur structure et leur complexité, et sont caractérisés par de arômes typiques provenant de l’eau-de-vie utilisée lors du mutage.
De multiples styles de vins rouges doux
Si le mutage est le plus courant en France, il existe de nombreuses autres possibilités pour obtenir un vin rouge sucré. Différents styles sont ainsi produits à travers le monde.
En Italie, l’une des méthodes les plus répandues est le passerillage. Cette technique, couramment utilisée en France pour l’élaboration des vins blancs doux tels que le vin de paille du Jura, sert à produire l’une des spécialités de Vénétie : le Recioto della Valpolicella. Les raisins, principalement issus du cépage local corvina, sont récoltés suffisamment tôt pour qu’ils conservent un bon niveau d’acidité, puis séchés en intérieur dans des hangars climatisés afin de concentrer les sucres et les saveurs, au minimum jusqu’au 1er décembre suivant la récolte. Ces vins offrent une structure charpentée, un degré alcoolique élevé ainsi que des arômes concentrés de fruits rouges et d’épices.
Dans le nouveau monde, certains vins rouges sont issus de vendanges tardives, les raisins étant suffisamment riches en sucre pour que la fermentation alcoolique s’interrompe naturellement. Étiquetés « late harvest », ces vins sont particulièrement répandus aux États-Unis, notamment en Californie où ils sont souvent élaborés à partir du cépage zinfandel.
Vous l’aurez compris, les vins rouges sucrés, de la même manière que les blancs, peuvent être élaborés de manières très différentes et ainsi se décliner dans toute une gamme de styles, ce qui en fait de parfaits compagnons de repas.