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Les Vacqueyras blancs : une rareté diverse et variée encerclée par les cyprès
Dès que mes pieds foulent le sol escarpé de l’appellation Vacqueyras, mon cœur s’emballe. Le soleil à la fois doux et généreux caresse ma peau, mon nez est aux aguets, irrésistiblement attiré par des nuées salines et le chant des cyprès qui diffuse des incursions finement boisées. La sérénité enveloppe le village de pierre où le temps semble suspendu. Seules les cloches viennent troubler de manière inattendue ce calme olympien. J’aperçois au loin de petites sphères dorées enfermées dans leur écrin végétal : ne serait-ce pas un appel au vin ?
L’Escalade du plaisir et du goût
Appréhender le nectar des vins blancs de Vacqueyras n’est pas chose aisée. C’est à coup de courage et de détermination qu’on parvient à se hisser sur les terrasses de l’appellation, où les vignes se prélassent. Une fois l’effort de montée effectué, je me réfugie, déshydraté, sur la terrasse du domaine Le Clos de Caveau, mirador époustouflant pour contrôler la beauté apaisante des environs. Le Maître des lieux, Henri Bungener, me tend un verre puis use de vers pour faire écho à sa passion. Même si sa collection alcoolisée est largement dominée par la couleur rouge, le blanc et le rosé ne sont pas mis de côté. Le punch parfumé de sa cuvée Le Mistralet, souligné par l’omniprésence de Muscat, ainsi que la suavité brillamment détonante de son Louis d’Or me donnent le sourire aux lèvres.
Vacqueyras offre aux palais exigeants des alternatives récréatives et jouissives aux sacro-saints flacons rouges qui inondent – à 97% – les caves de l’appellation. Toutefois, chaque appellation réserve son lot d’exigences et de contraintes. Si la cuvée Le Mistralet est bien un enfant du pays, elle n’est pas estampillée AOC Vacqueyras en raison de son cépage, le Muscat, recalé et privé de célébrité.
Une Diversité vibrante et assumée
Je n’ai, au cours de ma vie, pas goûté un seul Vacqueyras blanc qui ressemblait à un autre. En dépit de sa production limitée qui frustrerait le premier glouton venu, chaque virtuose des vignes de Vacqueyras joue sa propre partition, ne serait-ce que dans la composition des flacons. Là où le Domaine Font Sarade va faire la part belle à la sensuelle Roussanne, le Domaine des Amouriers va crier son amour au Grenache Blanc. Les sols regorgent aussi de variété : une marne argileuse couve les raisins blancs du Domaine Font Sarade tandis que le Domaine des Amouriers est dominé par une surface argilo-calcaire rouge à galets roulés.
Les choix de vinification apportent encore une part de singularité au vin dégusté : 12 mois d’élevage en fût de chêne de 600 litres pour enrober le liquide du Domaine des Amouriers d’une texture légèrement fumé et boisé alors que la cuve inox est largement plébiscitée du côté de Font Sarade pour donner de l’allant au croquant des fruits jaunes et jouer la carte de la vivacité.
Une Acquisition délicate mais délectable
Mon cœur a fondu devant l’exquise maturité du millésime 2016 du Domaine des Amouriers, remarquable de profondeur et d’amplitude. Puis il a pris un coup de fouet vivifiant, entre notes iodées, salinité et zestes d’agrumes à l’ouverture du millésime 2018 du Domaine Font Sarade.
2 interprétations distinctes réunies sous le toit d’une même appellation. J’aime le vin lorsque les nuances prennent le pas sur la fadeur, la platitude et l’uniformité. Les blancs de Vacqueyras cultivent leurs jardins et jouent de leurs différences. Le plus difficile, croyez-moi, ce n’est pas de les apprécier. C’est de mettre la main sur ces raretés.