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Si la Champagne est l’une des régions les moins engagées dans une pratique biologique de la viticulture avec seulement 2,9% de l’aire d’appellation Champagne en production bio – a titre de comparaison, à latitude semblable, le Jura a par exemple plus de 15% de son aire d’appellation en bio – le passage à une viticulture biologique connait un essor important dans la région. Les derniers chiffres disponibles produits par l’Observatoire de la viticulture bio en Champagne font ainsi état d’une progression de la surface conduite en bio de 38% entre 2017 et 2018.
La viticulture bio, une production respectueuse de la vigne et de son environnement
La viticulture bio est une méthode de production dont l’objectif est de respecter et améliorer les sols, d’encourager la biodiversité et d’une manière plus générale de préserver l’ensemble de l’environnement autour de la production du vin. Des certifications existent pour délivrer un label biologique pour les producteurs respectant la règlementation nationale ou européenne en matière d’agriculture biologique, qui concerne en particulier l’interdiction de l’usage de produits chimiques de synthèse et d’OGMs.
Pour respecter ce type d’engagement, le sol et son travail sont la première préoccupation des vignerons en bio. Afin d’entretenir le sol et de le stimuler – en particulier en encourageant le développement de l’écosystème de micro-organismes qui y vivent – un travail autour du labour, de l’enherbement ainsi que d’engrais bio et de compost est réalisé. La protection de la vigne contre ses ravageurs et maladies doit aussi être repensée dans le cadre d’un travail en bio.
Contre les ravageurs, l’introduction dans les vignes d’espèces prédatrices est une solution souvent utilisée. Contre les maladies de la vigne, l’utilisation de plantes médicinales et de matières naturelles est plébiscitée. En effet, il reste possible en viticulture biologique d’utiliser des produits naturels tels que le cuivre, l’argile ou le soufre – dans des quantités règlementées – afin de procéder au traitement dans la vigne.
Certains vignerons choisissent l’aller plus loin dans cette démarche avec l’application de la biodynamie dans la conduite de leur vignoble. Si les principes de base sont les mêmes pour le bio et la biodynamie, cette dernière implique également l’utilisation de préparations naturelles à base de plantes médicinales pour le traitement de la vigne et la prise en compte des influences cosmiques – c’est-à-dire du soleil, de la lune, des planètes et du zodiac – dans le travail effectué dans la vigne et en cuverie.
Les pratiques biodynamiques possèdent également leurs propres certifications – par exemple les labels Demeter ou Biodyvin – pour attester que les vins produits dans des domaines se réclamant de ces principes correspondent bien au cahier des charges de l’agriculture biodynamique.
La viticulture biologique en Champagne, une amélioration lente mais constante
Si la viticulture biologique et ses principes ont été appliqués en Champagne par quelques précurseurs à partir des années 1970, ce n’est qu’à partir des années 2000 que l’on voit une réelle tendance à l’augmentation des pratiques bio dans la région. Le processus de transition pour les producteurs champenois est particulièrement long.
C’est en effet la quatrième vendange réalisée après l’engagement d’un producteur dans une conversion qui pourra être labellisée en bio et il faudra encore ajouter à cela les durées minimum de vieillissement en bouteilles imposées par la régulation champenoise (quinze mois pour des champagnes non millésimés, trois ans pour des cuvées millésimées) pour arriver à une sortie de la première cuvée certifiée bio d’un domaine entre six et huit ans après l’engagement dans le processus de conversion.
De ce fait, si l’on trouve, en 2018, pas moins de deux cent quatre domaines au sein de l’Association des Champagnes Biologiques qui recense les producteurs labellisés bio en Champagne, nombre de vignerons actuellement en conversion viendront grossir les rangs des producteurs de champagne bio dans les années à venir.
Les maisons de champagne emboitent également le pas des vignerons concernant une viticulture biologique avec plus de réticence étant donné le défi logistique que constitue la conduite de centaines d’hectares de vignes selon ces méthodes. Ainsi si des maisons d’une taille plus restreinte comme Leclerc Briant, maison sparnacienne à l’avant-garde de la biodynamie en Champagne, ont depuis longtemps entrepris et maitrisé ce processus, c’est très rarement le cas des grandes marques de négoce de la région.
Une exception notable est cependant la maison de Champagne Roederer qui a commencé la bascule vers des pratiques biodynamiques avec dix hectares certifiés Demeter en 2004. Le reste des 132 hectares de la maison sont en conversion depuis 2018 ce qui devrait permettre au domaine d’être entièrement certifié d’ici à 2022.
Ainsi, au travers des différents exemples ci-dessus on constate qu’un mouvement de rattrapage du retard en matière de viticulture biologique s’est amorcé parmi les producteurs de Champagne. De plus une partie des vignerons de la région s’intéressent à ses pratiques et s’en inspirent sans chercher à faire certifier leur domaine pour garder la possibilité d’utiliser des produits de synthèse si les conditions météorologiques et sanitaires l’imposent.
Cet effort collectif des producteurs champenois avec une amélioration continue des pratiques est à saluer et assure au consommateur une qualité de bulles de plus en plus importante et une consommation vineuse de plus en plus responsable.