Sommaire
C’est autour d’un verre de Sauternes – plus précisément de Barsac, un cru limitrophe à Sauternes, que je suis tombé amoureux du vin. Ecouter Jean-Jacques Dubourdieu vous présenter le Château Doisy-Daëne est une expérience comme nulle autre. La passion qu’il partage avec vous ne laisse personne de marbre et la dégustation de sa rarissime cuvée Extravagant est une vraie symphonie des sens. Le Sauternais a donc eu une place privilégiée dans ma vision du vignoble français. Alors pourquoi Sauternes est-il Sauternes ?
La légende du Sauternais
La légende veut que l’acte de naissance de Sauternes ait été un pur hasard. La région a toujours été productrice de vin mais pas toujours des liquoreux que l’on connaît aujourd’hui. Un ancêtre des Lur-Saluces (propriétaire du château de Fargues et anciennement du château Yquem) serait rentré de Russie trop tard pour la vendange classique mais aurait tout de même décidé de ramasser les baies. La pratique de vendanges plus tardives sur un cru à proximité d’un cours d’eau, le Ciron en l’occurrence, permet le développement d’un champignon, le botritys cinerea, qui concentrent les sucres du raisin et permettent l’élaboration de vins doux. Quel crédit accorder à la légende ? Nul n’en a la réponse mais une chose est sûre, le sauternais a réussi à trouver une combinaison parfaite entre sa technique de vendanges et ses cépages. Sémillon, sauvignons blanc et gris et, dans une moindre mesure, la muscadelle, sont parfaitement adapté à « la pourriture noble » (apparition de botrytis sur les baies).
Le sémillon roi
L’équilibre entre les cépages est quant à lui moins complexe à saisir. Le sémillon, majoritaire la plupart du temps, apporte au vin sa texture grasse et son aromatique de fruits exotiques confits. Les sauvignons sont quant à eux là pour rappeler un univers floral au dégustateur avec de jolies notes de miel voire même ramener la saveur d’agrumes confits dans le sucre.
Le grand problème est alors de récolter ces baies à la bonne maturité pour produire les grands Sauternes que l’on connaît aujourd’hui. Trop tôt et le botrytis n’aura pas fait son effet et la vendange ne permettra pas d’obtenir de vin doux. Trop tard et on sera face à de la « pourriture grise », c’est-à-dire une mauvaise dérive du botrytis. Faire du Sauternes est donc un vrai numéro d’équilibriste.
Des vins parfois atypiques
Certains domaines n’en ont peut-être pas assez de cette complexité et s’ajoute une difficulté supplémentaire. Le château d’Yquem, par exemple, a lancé la tendance à la production de vins secs dans le Sauternais, c’est-à-dire de vendanger les baies avant l’arrivée du botrytis. Le maître de culture doit donc jongler entre les vignes à garder pour l’élaboration des liquoreux et celle pour l’élaboration des blancs traditionnels.
Si on en revient à L’Extravagant de Doisy-Daëne, les Dubourdieu ont eux aussi fait un parti pris avec cette cuvée en inversant les ratios pour avoir une majorité de Sauvignons qui viennent apporter une grande fraîcheur au vin sans perdre l’intensité du Sauternais.