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Le Merlot roi
A Bordeaux, un adage fait foi quand on en vient aux vins : « Cabernet-Sauvignon rive gauche et Merlot Rive Droite ». On pénètre donc aujourd’hui en terres conquises par le Merlot. Alors pourquoi cette différence ? Le terroir est la notion clef pour décrypter cela : sol argilo-calcaire et climat plus frais sur la rive droite permettent au merlot de s’épanouir face à une rive gauche plus graveleuse et solaire.
On retrouve toutefois des deux cépages sur les deux rives car Bordeaux reste avant tout une terre d’assemblages mais le merlot est, la plupart du temps majoritaire dans le libournais et les appellations limitrophes. Dans sa jeunesse il vient apporter toute sa gourmandise aux vins et gagne à vieillir pour gagner en complexité. Le merlot c’est donc le fruité – de jolis fruits rouges confits – qui manque tant à la rive gauche dans ses premières années, c’est aussi un cépage qui apporte une structure tannique moins importante. Il ne faut donc pas attendre le dixième anniversaire de son vin pour se régaler avec la rive droite. Mais si vous en avez l’occasion, laissez-la vieillir pour rentrer dans le domaine du sublime : des notes de truffes agrémentées dans un univers forestier apparaissent après quelques années en cave et, cela vaut très sûrement le détour.
Mais quel rôle jouent les autres cépages dans ce cas ? Les cabernets – franc et sauvignon – apportent un degré de complexité supplémentaire au vin en plus d’une matière supplémentaire. On peut ainsi retrouver sur la rive droite certains des marqueurs médocains comme un aspect végétal sur des notes de fougères ou encore une dimension épicée qui vient s’ancrer dans un registre poivré. L’important reste que l’on ne perd ni la fraîcheur ni la gourmandise de la rive droite.
La rive droite à table
On laisse ici de côté les viandes grillées, mieux adaptées à la structure tannique de la rive gauche, pour se consacrer à des mets plus fins. Un carré d’agneau de lait rôti au four avec une jolie sauce au vin rouge ira comme un gant à votre Saint-Emilion, la tendresse de la viande et la cuisson peu marquée sauront flatter votre vin de la meilleure des façons : tout en finesse. Vous viendrez chercher de petites framboises confites dans votre verre et apporterez ainsi une dimension supplémentaire et une note de fraîcheur à votre plat. Pour une grande occasion, n’hésitez pas à sortir de cave vos vieux Saint-Emilion et Pomerol autour d’un tournedos Rossini par exemple.
Deux grands centres et multitudes de légendes
Peu importe si vous savez les situer dans la géographie locale, vous avez tous en tête des grands noms quand on parle de Bordeaux. Ici et là, on entend parler de Petrus et ses prix mirobolants – plusieurs milliers d’euros le flacon – ou encore de Cheval Blanc, Ausone, Angélus et Pavie, les quatre propriétés qui font la course en tête du classement des grands crus de Saint-Emilion. Ces légendes du vignoble français sont toutes sur cette rive droite bordelaise, polarisée autour de deux appellations : la petite Pomerol et son mythique Petrus, la grande Saint-Emilion et ses crus classés.
Boire un Pomerol est une occasion rare pour un dégustateur tant le volume de production est faible par rapport à ses voisins bordelais. Mais, cela apporte toujours une grande émotion, on sent bien là la marque d’un grand terroir qui repose sur un veine d’alios apportant toute sa complexité au vin.
De l’autre côté de la ligne de démarcation, Saint-Emilion est plus hétérogène mais les meilleurs grands crus sont tous plus marquants les uns que les autres. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Bernard Arnaud a investi dans Cheval Blanc : ses traversent les âges avec une sérénité décomplexée, atteignant chaque année un degré de complexité supplémentaire.
Aller chercher les rapports prix-plaisir
Il serait toutefois mauvais de ne se limiter qu’aux crus renommés de Saint-Emilion et Pomerol lorsque l’on part à l’exploration de la rive droite de Bordeaux. En effet, ces vins au caractère souvent exceptionnel sont difficiles d’accès pour beaucoup de portefeuilles. Pas de panique, le libournais renferme une pléthore d’appellations moins connues où il fait tout aussi bon boire ! A commencer par les « satellites » de Saint-Emilion – Montagne Saint-Emilion, Puisseguin Saint-Emilion, Lussac Saint-Emilion… Ensuite, vous pouvez vous laisser surprendre par les rapports prix-plaisir imbattables de certains châteaux du côté de Fronsac. Le tout est de se faire conseiller la pépite qui vous fera chavirer ! Prenez par exemple le château Moulin Pey-Labrie, un Canon-Fronsac qui a tout d’un grand, et qui saura tromper tous les amateurs après quelques années en bouteille.