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Est-ce que le Beaujolais est un Bourgogne ?

Sommaire

La question se débat depuis des siècles : le Beaujolais est-il un vin de Bourgogne ? Sur certains points, oui, et sur d’autres non, pas du tout. C’est aussi simple que ça, et voici pourquoi.

L’AOC Beaujolais

 

Le Beaujolais sait faire parler de lui. Beaucoup le connaisse grâce au Beaujolais Nouveau, ce vin primeur qui sort chaque année le troisième jeudi du mois de novembre et qui respire la convivialité et le joli glouglou. Mais le Beaujolais ne se résume pas à son opération Beaujolais Nouveau, loin de là. 

La région viticole s’étire de la ville de Mâcon à celle de Lyon, au sud de la Bourgogne. Elle recouvre environ 9000 hectares de vignes que l’on peut découper en deux grandes zones : la première au Nord possédant des sols à dominante granitique, terre des Beaujolais Villages et des Crus du Beaujolais, et la deuxième, au Sud, à dominante argilo-calcaire où l’AOC Beaujolais générique est la plus présente. 

De par sa proximité évidente et son histoire, le Beaujolais a toujours été plus ou moins rattaché à la Bourgogne viticole. D’ailleurs, ce n’est qu’à partir du 14ème siècle que la région du Beaujolais (qui tient son nom du village Beaujeu, situé au Nord de Lyon) commence à prendre réellement forme lorsque le Duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, décide de bannir le cépage Gamay de toute la partie septentrionale de la Bourgogne. Par cette mesure, il renvoie ce cépage qu’il considère déloyal envers ses vins, vers les zones plus au sud de la région, pour laisser la part belle au Pinot Noir qui devient le cépage emblématique de la Bourgogne. 

Voilà l’une des raisons pour laquelle même si le Beaujolais fait partie administrativement de la Bourgogne viticole, il faut considérer ses vins à part.

Cépage et vinification, les différentes Beaujolais-Bourgogne

 

En effet, comment peut-on se demander si un Beaujolais est un Bourgogne lorsque l’on connait toutes les différences qui les séparent ? 

La première, et pas des moindres, est celle évoquée un peu plus haut : le cépage. En Bourgogne, le Pinot Noir est roi. Complexe, ce cépage est à l’origine des plus grands vins rouges grâce à sa belle finesse et à sa vaste palette aromatique. Natif de la région, le Pinot Noir possède une superbe capacité à interpréter le terroir sur lequel il pousse. C’est grâce à cette perméabilité et au travail unique de chaque vigneron bourguignon qu’il existe aujourd’hui de nombreuses nuances parmi des vins issus d’un seul et même cépage. 

Dans le Beaujolais, c’est le Gamay noir à jus blanc qui est utilisé. C’est le seul cépage rouge autorisé.  Il donne naissance à des vins rouges fruités, légers et gouleyants. Lorsqu’il est utilisé pour l’élaboration des Crus du Beaujolais, il peut aussi donner des vins de caractère au grand potentiel de garde. 

La deuxième différence entre Beaujolais et Bourgogne réside dans la technique de vinification. En effet, quand la Bourgogne utilise une méthode de vinification en rouge plutôt classique, le Beaujolais met très souvent en place une vinification faisant appel à une technique nommée « macération carbonique ». Explications : après avoir vendangé le raisin à la main, les grappes sont placées entières dans de petites cuves. On ajoute ensuite du CO2 afin d’éliminer toute trace d’oxygène dans la cuve. Cette atmosphère chargée de gaz carbonique entraine alors ce qu’on appelle une « fermentation intra-cellulaire » à l’intérieur des baies de raisin et une partie des sucres se transforme en alcool. Une fois que le degré d’alcool dans les baies atteint 2%, leur pellicule éclate et le jus est libéré. C’est à ce stade que l’on récupère le raisin pour le presser et séparer le jus des matières solides. La fermentation alcoolique traditionnelle pourra ensuite avoir lieu. En utilisant ce procédé de macération carbonique, les vignerons du Beaujolais ont la possibilité d’extraire de la couleur de leur raisin sans pour autant extraire trop de tannins. De fait, les vins obtenus sont plus fruités et gourmands. 

Autre méthode de vinification utilisée dans le Beaujolais : la macération « semi-carbonique ». Elle consiste presqu’exactement à la même chose que la macération carbonique à la différence qu’ici, aucun ajout de CO2 n’est effectué dans la cuve, qui par ailleurs est généralement est généralement plus grande que pour la macération carbonique. Là, on assiste à plusieurs phénomènes : les baies de raisin au fond de la cuve se tassent sous le poids du reste de la vendange. Du jus s’écoule alors et une fermentation alcoolique (transformation des sucres contenus dans le raisin en alcool) se déclenche, libérant du gaz carbonique dans la cuve. L’oxygène présent dans la cuve est peu à peu remplacé par le gaz carbonique et les raisins présent sur le haut de la vendange subissent alors une fermentation intra-cellulaire. Cette méthode permet une meilleure intégration des arômes issus de la fermentation intracellulaire et donne des vins au caractère fruité plus frais. Notons que tous les vignerons du Beaujolais ne vinifient pas leurs vins de la même manière et que certains privilégient la méthode classique. 

Du Bourgogne produit dans le Beaujolais

 

Les différences majeures que l’on vient de souligner entre les vins du Beaujolais et de Bourgogne pourraient nous pousser à croire que la séparation entre les deux régions est bien marquée. Mais ce serait sans compter sur les petites subtilités administratives qui subsistent et qui peuvent parfois embrouiller l’esprit de l’amateur désireux de comprendre. 

En effet, il est bon de noter par exemple qu’il est tout à fait possible de produire un vin sous l’appellation d’origine contrôlée « Bourgogne », lorsque l’on se trouve dans… le Beaujolais. Car si depuis le début nous parlons beaucoup des vins rouges, il ne faut pas oublier que le Beaujolais peut également produire des vins blancs à base de Chardonnay. Le Chardonnay étant, rappelons-le, le cépage blanc phare de la Bourgogne. On retrouvera donc cette production sous l’AOC Beaujolais blanc (très rare), mais aussi, sous les AOC Bourgogne Blanc et Crémant de Bourgogne (effervescent). 

Et n’oublions pas non plus, que jusqu’en 2011, le Beaujolais pouvait produire des vins rouges en AOC Bourgogne ! 

Alors, le Beaujolais est-il un Bourgogne ? Tout dépend du point de vue où l’on se place : administratif, viticole ou gustatif ?

© Photo : Anastasia Sidorova sur Unsplash
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De Chloe Desaigues

Sommelière tombée dans le digital, Chloé, bordelaise pure souche, mais bordelaise ouverte (!), aime manier les mots pour partager avec le monde. Animée de poésie et d’un esprit vagabond, c’est naturellement que le vin, la gastronomie et les voyages deviennent ses meilleurs amis.

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