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Un goût lié au contenant
Il y a 2000 ans, les gaulois inventent le tonneau. Ce récipient en bois, plus résistant que l’amphore ou la jarre, permet un transport plus facile du liquide, néanmoins, il n’est pas neutre. Un fût ou une barrique échange avec le vin, il lui transmet de nouveaux arômes, une structure différente en bouche, les tannins évoluent et se patinent. Le fût de chêne ajoute de nombreux composés aromatiques naturels au vin durant le phase de l’élevage.
Parmi ceux-ci on retrouve le gaïacol, qui apporte des notes de bois fumé au vin, ou encore le furfural ou les lactones qui révèlent des arômes d’amande grillée ou encore de noix de coco. C’est alors de cet échange entre le bois du contenant et le vin que provient ce fameux goût « boisé » à la dégustation.
Un goût fortement influencé par le processus de fabrication des tonneaux
Tandis que l’élevage en fût ajoute forcément un goût de bois au vin, le choix du bois, son origine, la chauffe du tonneau ou encore son âge, peuvent apporter de multiples nuances à ce goût « boisé ».
Dans la production des fûts, le bois de chêne est très largement dominant, il est en effet de bien meilleure qualité que le bois de châtaignier qui n’est plus guère utilisé. Néanmoins il est possible de trouver des vins élevés dans des fûts de bois plus rares comme l’acacia ou encore le quebracho.
De manière générale, le chêne français est souvent utilisé pour vieillir des vins haut de gamme car il y développerait des notes d’une grande subtilité. Le bois de la forêt de Tronçais dans l’Allier est ainsi l’un des plus reconnu et apprécié, pour les arômes de vanille qu’il apporte au vin. Le chêne américain est lui aussi très utilisé et recherché pour les touches épicées qu’il apporte aux vins rouges.
Lors de la fabrication des fûts, le bois est chauffé au brasero par le tonnelier. Cette étape est une nouvelle fois déterminante pour les futures saveurs boisées qui seront présentes dans le vin. En effet, ces dernières pourront varier selon l’intensité du toastage et passer de notes épicées à des notes grillées ou brûlées.
Finalement, l’âge du fût dans lequel le vin est vieilli est lui aussi déterminant. Un fût neuf transmettra beaucoup d’arômes et de tannins au vin tandis qu’un fût âgé de plus de 4 ans pourra quasiment être considéré comme un contenant neutre. Ainsi il est primordial pour le vigneron de bien choisir le fut en fonction du vin pour ne pas risquer qu’un vin qui ne bénéficie pas d’une structure suffisante ne soit masqué par le bois d’un fut trop neuf.
Il est ainsi fréquent que les vignerons fassent le choix de transvaser les vins d’un fût neuf à un fût plus vieux après une certaine période de vieillissement pour éviter qu’un goût trop fort de bois ne s’y développe.
Un goût parfois créé artificiellement
Dans les années 80, particulièrement dans la région de Bordeaux, le goût de bois était très apprécié dans le vin et est devenu un réel argument marketing. On retrouvait ainsi en grosse lettre la mention « élevé en fût de chêne » sur de nombreuses étiquettes de bouteilles. Dans le but de tirer profit de cet engouement pour les vins « boisés » certains tonneliers ont ainsi commencé à forcer le toastage du bois des tonneaux pour en accentuer les notes fumées qui se transmettraient après au vin. Enfin des vignerons allaient même jusqu’à infuser des copeaux de bois dans leur vins pour créer artificiellement ces arômes.
Cette dernière méthode est toujours utilisée aujourd’hui et a été autorisée officiellement en 2006. Néanmoins elle est plus courante dans l’élaboration de vins de table ou vins de pays et reste interdite pour tous les vins d’appellation d’origine protégée . Si le goût de bois dans le vin est aujourd’hui beaucoup moins apprécié et recherché, l’élevage en fut de chêne reste courant pour permettre une meilleure oxygénation du liquide et lui octroyer une certaine rondeur et une patine.
© Photo : Andrane de Barry